Ma façon d’enseigner la conduite moto est fondée sur mon expérience personnelle.
J’ai commencé la moto « tard » (par rapport à beaucoup), à 24 ans et sans aucune expérience du deux-roues motorisé. Je suis passé directement du vélo à la 125, puis à la Yamaha XJ600N. Et ce fut compliqué… J’ai raté quatre fois l’examen plateau avant de le valider… mais d’échouer à l’épreuve en circulation, principalement parce que l’inspecteur trouvait que je ne roulais pas assez vite. Il m’a fallu repasser l’examen de code, de nouveau le plateau et encore une fois la route. J’ai tout réussi du premier coup parce qu’en parallèle, j’avais déjà commencé à rouler en moto 125 et que j’avais pris confiance en moi au cours de 5.000 km en moins de six mois.
Mais quand j’ai commencé la moto « gros cube » avec une moto pourtant facile (Honda NTV 650 Deauville), je me suis vite aperçu que je n’étais pas au point, pas à l’aise. Alors j’ai suivi des stages de perfectionnement post-permis, les rares qui existaient à cette époque (début des années 2000). Et surtout, j’ai eu la chance de pouvoir intégrer le club moto de l’école de gendarmerie de Fontainebleau ! Pendant deux ans, je suis allé m’entraîner le samedi sur les pistes techniques du polygone et sur les chemins sablonneux, d’abord avec une vieille « enclume » BMW R60/6 du club, puis avec une ancienne R65GS d’instruction que nous avions récupérée aux Domaines et retapée.
Avec tout cela, il m’a fallu environ trois ans au total (depuis mes débuts) pour commencer à me sentir à l’aise, performant et en sécurité sur route, au bout d’environ 100.000 km parcourus.
Depuis, je n’ai jamais arrêté d’apprendre et de progresser.
Je roule toujours (beaucoup, 25.000 à 50.000 km par an), mais je suis aussi régulièrement des formations, j’effectue des stages d’enduro et de trial, j’essaie différentes disciplines moto…
Pourquoi je vous raconte ça ?
- Pour expliquer que je suis un ancien « gros mauvais », que je ne suis pas un « pilote », que je ne suis pas spécialement doué au guidon, que je sais très bien ce que c’est de rater, de ne pas y arriver, d’avoir du mal…
- Pour souligner que c’est avant tout une question d’entraînement, donc de motivation !
Je suis comme Marius, ancien instructeur des commandos-marine, je crois aux vertus du Motivex et de la Moraline. - Pour vous faire comprendre que si j’y suis arrivé, n’importe qui (ou presque) peut y arriver.
C’est sur ces bases et en échangeant pendant des années avec les stagiaires de l’association Casim (où je suis formateur bénévole depuis 2009) que j’ai progressivement mis au point ma pédagogie, ma façon bien à moi d’enseigner, qui a évolué et continue d’évoluer dans le temps.
- Un point fondamental est que l’apprenant motard doit se sentir en confiance pour apprendre correctement.
On ne peut pas apprendre à moto, qui implique un risque pour son intégrité physique, quand on a peur de se faire mal. C’est au formateur d’assurer la sécurité des personnes et des matériels, de savoir rassurer, mettre en confiance, afin de favoriser la progression pédagogique. - Dans cette logique, je cale toujours la progression pédagogique d’un cours collectif sur la personne la moins à l’aise. C’est elle qui a le plus besoin de progresser. Ceux qui sont plus à l’aise progresseront aussi, mais moins. Les plus à l’aise consolideront leurs acquis.
- A moto, il n’existe pas une et une seule manière de faire.
En fonction de la situation, de la moto (géométrie de la partie-cycle, poids, hauteur de selle, centre de gravité, position de conduite) et de son conducteur (morphologie, niveau de maîtrise), il faut savoir adapter la ou les technique(s) possible(s). Il existe toujours plusieurs techniques pour une situation donnée. L’important est de trouver celle qui vous convient le mieux pour vous et votre moto. - A moto, il n’existe pas de « meilleure » technique dans l’absolu.
Avec tout l’éventail des différentes disciplines sportives, tout comme avec la variété des méthodes mises au point depuis des décennies par les instructeurs des différentes écoles des motocyclistes d’administration, on peut observer plusieurs manières de faire pour chaque manoeuvre, pour chaque situation. Aucune n’est systématiquement meilleure que les autres. Par contre, une technique donnée pourra être bonne dans telle situation pour telle personne avec telle moto.
A partir de ce constat, il existe deux approches pédagogiques possibles.
La première, la plus courante, est de choisir une technique par situation de conduite, celle qui convient au plus grand nombre. C’est plus simple, plus rapide, plus facile pour le formateur. Pas de question à se poser.
La seconde est d’expliquer l’éventail des solutions possibles et d’accompagner chaque élève à trouver celle qui lui convient en fonction de chaque situation de conduite. C’est forcément plus complexe, plus long, plus nuancé. Mais cela permet de répondre aux besoins de chacun et de chaque situation.
J’ai appris auprès d’instructeurs civils comme militaires, de moniteurs moto en formation initiale et en perfectionnement, en France et en Belgique, de gendarmes du CNFSR de Fontainebleau, de policiers de l’ex-école moto de la préfecture de police à Chevilly-Larue, de policiers du CNFM-PN de Sens, d’un ancien instructeur de l’école des brigades motocyclistes à La Rochelle, d’éducateurs sportifs de circuit et d’enduro, d’un moniteur de trial, d’autres motards amateurs plus expérimentés que moi…
J’ai observé et analysé leurs méthodes techniques et pédagogiques, non pas pour rester dans la stricte reproduction de ce qu’on m’a appris, mais pour élaborer un syncrétisme centré sur l’élève, adapté à ses besoins et ses attentes.
Je propose souvent une analogie avec les arts martiaux, qui mêlent eux aussi l’apprentissage psychomoteur des gestes techniques et l’importance du mental, de la détermination, de l’esprit combatif.
Il existe différents arts martiaux, et pour chacun d’eux, différentes écoles, voire différents styles. Ces styles sont fondés par une personne, un maître dont les disciples vont ensuite reproduire l’enseignement à l’identique : 99,9% des instructeurs d’arts martiaux transmettent ce qui leur a été appris – et rien d’autre.
Et c’est souvent la même chose dans le monde moto. Bien des formateurs restent sur leurs acquis.
Sauf qu’une fois de temps à autre, quelqu’un prend du recul et décide de sortir du moule.
L’exemple le plus connu dans le monde des arts martiaux reste sans doute Bruce Lee et son « jeet kune do », qui s’inspire de techniques pré-existantes pour les combiner en y ajoutant ses techniques propres.
Le JKD est avant tout un concept martial, plus qu’un art martial au sens traditionnel.
Son objectif : « simple, direct et non classique ».
C’est exactement ainsi que je vois la technique moto pour la conduite de sécurité.
Nous motards de route n’avons pas les mêmes besoins, le même environnement, le même usage que les pilotes sportifs ou les motocyclistes d’administration ou les candidats au permis de conduire moto.
Les techniques de conduite doivent correspondre à la variété des machines utilisées, des situations rencontrées (en termes d’environnement, de terrain, de météo, de trafic), des morphologies de chacun, de l’équation complexe entre un(e) motard(e) et sa moto…
L’important, c’est ce qui fonctionne pour vous !
Mon boulot, c’est d’identifier ce qui vous convient et de vous apprendre à le mettre en place le mieux possible.